3.3. – Quel cadre pour les parrainages et les partenariats éditoriaux ?

Certains types d’information font l’objet de partenariats avec un organisme extérieur au média, par exemple les points météo avec Météo France.

Un journal ou une chaîne de télévision peuvent également soutenir une manifestation culturelle, sportive ou sociale.

Comment les partenariats sont-ils encadrés d’un point de vue déontologique ? Comment l’étanchéité entre le service marketing/commercial et la rédaction est-elle garantie ? Les risques d’autocensure sont-ils écartés ?

Réponses complètes

Allemagne

Berliner Zeitung : Limites très claires

L’imperméabilité totale entre la rédaction et les services marketing, publicité, promotion, parrainage, etc s’applique sans restriction.

ZDF : Un texte de référence

Les directives établies par le document intitulé : « ZDF-Richtlinien für Werbung,Sponsoring, Gewinnspiele und Produktionshilfe » traitent aussi la gestion des relations de la chaîne avec ses partenaires.

Belgique

De Standaard : Pas évident

Autant le rapport entre l’éditorial et la publicité est clairement défini, autant celui entre les actions de partenariat et la rédaction n’est pas évident. D’autant que les lecteurs peuvent avoir beaucoup de mal à comprendre qu’un journal qui soutient un spectacle ou un festival artistique n’en fasse que très peu mention ou en propose une vision critique.

La Libre Belgique : Sous l’égide du directeur des éditions

Le « directeur des éditions » chapeaute à la fois la rédaction et le service marketing. Le partenariat respectera l’image du journal et doit atteindre un certain niveau de notoriété.

Le partenaire paie en fonction de l’espace occupé dans le journal.

Le Soir : Des règles de forme

Lorsque Le Soir publie le programme d’une manifestation culturelle, l’autorisation du rédacteur en chef est nécessaire pour utiliser le logo ou la typographie du journal.

Il n’existe aucun lien structurel entre la rédaction et le service promotion ni aucune obligation de couverture éditoriale en cas de partenariat.

RTBF : Aucun lien entre l’information et le marketing

L’article 5 du code de déontologie de la RTBF stipule que les émissions d’informations ne peuvent pas être parrainées.

Il est interdit au service marketing de rechercher un partenariat en échange d’une couverture éditoriale.

Chaque année, la RTBF compte un millier de partenariats avec des acteurs culturels.

Brésil

A Folha de S. Paulo : L’intérêt journalistique prime

Le journal ne parraine que des événements qui revêtent une importance culturelle et qui intéressent le public lecteur de la Folha.

Cruzeiro do sul : NC

O Estado de S. Paulo : Indépendance de la rédaction

O Estado concrétise son appui à des événements par l’octroi d’espace publicitaire. L’acceptation d’un parrainage se base sur l’intérêt social et culturel ainsi que sur sa résonance à l’actualité.

Si l’événement parrainé présente un intérêt journalistique, il peut faire l’objet d’une couverture qui n’est donc pas systématique.

Rádio CBN : Convergence et complémentarité

La radio recherche des partenaires qui ont une ligne éditoriale proche de la sienne mais qui puissent proposer d’autres contenus. Par exemple: CBN renouvelle depuis 10 ans un partenariat avec la BBC, et depuis plus longtemps encore avec Radio France Internationale. La radio s’engage aussi dans des échanges avec d’autres médias du groupe Globo.

Les partenariats éditoriaux et publicitaires répondent aux mêmes obligations. Ne sont parrainés que les événements en adéquation avec le contenu de la station. La validation passe par le service marketing de la radio mais la rédaction est consultée.

TV Cultura : Les mêmes que pour la publicité

Les critères de partenariats sont les mêmes que ceux pour accepter ou non une publicité. Par exemple, boissons et cigarettes sont prohibés.

TV Cultura ne parraine aucun événement culturel.

TV TEM : Pas d’incidence sur la liberté de la rédaction

Toute entreprise ou organisation peut faire du partenariat ou du parrainage, sans toutefois que l’indépendance des journalistes ne soit restreinte.

Ainsi, bien que la préfecture ait financé le supplément spécial anniversaire de la ville, la rédaction n’a rien perdu de sa capacité à critiquer l’institution.

Par ailleurs, TV Tem peut entretenir des partenariats non commerciaux pour des événements particuliers. Elle ne finance pas mais s’engage à les couvrir. Une responsabilité qui incombe au service de la programmation.

Espagne

El País : Adaptés aux valeurs du journal

Avant les récentes contraintes budgétaires, El País a soutenu de nombreuses activités culturelles ou de coopération. Le plus souvent, aujourd’hui, le quotidien offre une campagne publicitaire ou participe à l’organisation d’une conférence ou d’un forum.

La Vanguardia : Aucune altération du contenu journalistique

Le Livre de style ne traite pas cette question mais force est d’observer que les parrainages et partenariats n’altèrent en rien le contenu éditorial des événements.

Dans le cas contraire, le Conseil Professionnel – organe de représentation de la rédaction - interviendrait pour défendre le principe exprimé dans le Statut de Rédaction et qui affirme que “la responsabilité et la rigueur” sont entre autres “l’axe qui inspire son action en tant que journal inscrit dans le journalisme de qualité”.

Le Trophée de Tennis Comte de Godó - du nom de l’éditeur – est ainsi parrainé par le quotidien. Si la rédaction accorde un traitement particulier en termes de couverture, sa liberté de ton reste totale.

Rádio Barcelona - Cadena SER : Selon le directeur des contenus

Toute opération de parrainage doit être en accord avec les principes et valeurs du directeur des contenus.

RNE : Exclusivement des partenariats culturels

La radio nationale poursuit depuis plusieurs années des partenariats avec un certain nombre de lieux culturels. Chaque station régionale est en lien avec des théâtres, des salles de concert et des festivals dont elle transmet les productions. En contrepartie le soutien de la RNE est affiché sur les programmes, montré par une signalétique in situ ou encore annoncé à l’antenne lors des retransmissions.

TVE : Pas de parrainage

TVE offre son appui par une fenêtre de diffusion qui n’est autre que les chaînes dont elle dispose. Cependant, elle ne collabore économiquement à aucune cause.

France

Europe 1 : Engagement moral

Toujours dans le cadre de cette réunion tripartite hebdomadaire, une discussion est engagée également au sujet des partenariats. Dans le cas d’un film, par exemple : les journalistes en charge de la rubrique cinéma sont consultés pour donner leur avis au préalable, la station ne souhaitant s’engager qu’auprès de films qu’elle a envie de défendre.

France 2 : Un contrat clair

Les contrats de partenariats spécifient qu’aucune contrepartie en termes de couverture éditoriale dans le journal télévisé ou une émission d’actualités ne peut être recherchée. Les contreparties peuvent inclure la diffusion de bandes-annonces ou de publicités, des publicités sur le web ou une citation dans une émission.

Pour certaines émissions d’information, des partenariats peuvent être mis en place. Par exemple, les informations météo peuvent être diffusées grâce à un partenariat avec le ministère du tourisme. Les soirées électorales peuvent être présentées en partenariat avec un institut de sondage ou un partenaire technologique (éditeur d’un logiciel).

France 24 : Un contrat spécifique

Le parrainage respecte les conditions prévues par le décret n°92-280 du 27 mars 1992, sous les réserves suivantes :

1. Les émissions d’information politique, de débats politiques et les journaux d’information ne peuvent pas être parrainés ;

2. Les émissions relatives à la santé ne peuvent être parrainées par les entreprises et les établissements pharmaceutiques visés aux articles L. 5124-1 à L. 5124-18 du code de la santé publique.

France Inter : Des règles claires

Les programmes sont très nombreux à France Inter, France Info et France Culture. L’acceptation ou le refus d’un partenariat est laissé à la volonté de chaque producteur. La règle principale est clairement édictée : un partenariat ne peut pas engager d’obligations éditoriales.

La Croix : Sous la responsabilité de Dominique Quinio, directrice de la Croix

Il existe un « comité partenariats » auquel D. Quinio participe, elle valide ou non les propositions faites par les rédacteurs ou par le service de communication (ce dernier centralise les sollicitations/propositions provenant de l’extérieur).

La Dépêche du Midi : NC

La Montagne : Préachats à l’occasion

D’un point de vue rédactionnel, La Montagne est très présente, par principe, sur toutes les manifestations (le journal est l’unique quotidien régional sur 3 des 7 départements qu’il couvre). Par ailleurs, Centre France Événements - une filiale du groupe Centre France - organise une quinzaine de salons par an (salon de l’habitat, du vin, etc.). Un système de préachats est alors mis en place avec les partenaires, afin que des journaux puissent être distribués gratuitement dans le cadre de ces manifestations.

La Nouvelle République : Couverture accrue mais indépendante

Seules les manifestations susceptibles d’intéresser le lecteur, a priori, font l’objet d’un parrainage ou d’un partenariat, par exemple un congrès de médecine à Tours. Le (ou les) jour dit, un effort rédactionnel est fait, en accord avec la rédaction en chef, pour « couvrir » l’événement.

La Provence : Une charte spécifique

Pour préserver l’indépendance des journalistes, une charte sur le bon usage des partenariats a été rédigée en 2010 à la demande des syndicats.

La rédaction peut s’engager par contrat à annoncer une manifestation et à publier par exemple les résultats d’une manifestation sportive mais le contenu appartient aux seuls journalistes.

Toute publication qui n’est pas produite par la rédaction doit être clairement annoncée comme telle. Et la SDJ veille au grain.

La Voix du Nord : La rédaction est décisionnaire

Le rédacteur en chef, également directeur de la rédaction, a tout pouvoir pour choisir les conditions de parrainages et les partenariats ainsi que pour décider de la place accordée à l’événement dans le journal.

Le Figaro : La rédaction est décisionnaire

Une « bonne critique» peut déclencher une envie de partenariat. C’est alors le service culture qui proposera de soutenir un film qu’elle apprécie.

Le Monde : Sous le contrôle de la rédaction

L’usage veut que les partenariats soient placés sous le contrôle des journalistes concernés. Ainsi un partenariat avec un concert peut être proposé par les journalistes spécialisés dans la musique.

Le Parisien/Aujourd’hui en France : Validation par la rédaction

La distinction entre rédactionnel et publi-rédactionnel est toujours indiquée et soumise à la validation du directeur de la rédaction.

Le Progrès : Une rédaction à part

Le « service de la valorisation des marques » prend en charge la rédaction des suppléments publi-rédactionnels.

Libération : La rédaction est décisionnaire

La rédaction choisit certains partenariats. Dans d’autres cas, le demandeur de partenariat est orienté vers le service commercial qui s’occupera du « publi-rédactionnel » rédigé par une agence extérieure de contenu. La typographie du journal ne peut pas alors être utilisée. La mention « La rédaction n’a pas participé » est même apposée sur ce supplément.

Ouest France : Une charte spécifique

Une charte des partenariats a été signée le 9 octobre 2006 par la direction et les syndicats (CFDT, SNJ). L’article 3 de cette charte précise que « les partenariats ne doivent en aucun cas engager l’indépendance de la rédaction ».

Les conventions de partenariat sont signées dans chaque département par le directeur de la rédaction concernée.

RTL : Deux types différents

RTL engage deux types de partenariats. Le premier peut associer la station un « produit culturel », comme par exemple un film (« The Artist »). Ainsi, Jean Dujardin a été interviewé aussi bien dans les journaux de la rédaction que dans des émissions rattachées à la direction des programmes. C’est donc un échange, qui se fait dans l’intérêt des uns et des autres.

Autre type de partenariat : celui avec la presse, tel le prix RTL/Lire, décerné chaque année depuis 1993 à un roman, par des libraires et des auditeurs. Il s’agit, là aussi, d’intérêts bien compris, l’idée étant d’être à la fois interactif, accessible au grand public et de privilégier la qualité.

Sud Ouest : Trois types de suppléments

Des suppléments publicitaires sont gérés directement par le service publicité.

S’il existe des suppléments rédactionnels dont la thématique peut être choisie en fonction de sa capacité à attirer des annonceurs, le service publicité n’intervient pas dans l’aspect rédactionnel.

Enfin des suppléments dits « de communication » peuvent être réalisés sur proposition d’une entreprise ou d’un organisme extérieur. La charte graphique est alors différente de celle du journal et il est précisé que le contenu n’a pas été rédigé par la rédaction. Ce type de travail fait néanmoins l’objet d’un débat entre la direction et la Société des rédacteurs.

Sud Radio : Au cas par cas

Il existe des contrats de partenariat pour le contenu « sport » des programmes, par exemple des places à gagner lors d’un match du Stade Toulousain en échange d’annonces répétées dudit match à l’antenne, mais ces accords n’empiètent pas sur le contenu éditorial.

TF1 : Le service de communication externe

TF1 accepte les partenariats en fonction de l’intérêt éditorial de l’événement. Il n’existe pas de charte pour les encadrer et c’est le service de communication externe qui les gère.

Irlande

The Irish Times : Clairement défini

L’Irish Times tient en haute estime le travail journalistique. Il est évident qu’aucun partenaire ou annonceur ne peut se permettre de commander un article, d’intervenir dans la maquette du quotidien ou même de tenter de faire passer une publicité pour un article. Les règles du jeu sont connues et respectées sans aucune entorse, malgré quelques régulières tentatives.

Pologne

Polskie Radio, kanal 3 : Des interférences

Les partenariats sont très courants à la radio publique polonaise qui représente un sponsor médiatique de choix.

Ils peuvent provoquer de lourdes conséquences, telles que des changements de programmation ou des interférences avec les contenus, notamment dans certaines émissions. Ainsi, un programme consacré à la littérature, par exemple, ne pourra citer que des livres fournis par son sponsor.

Royaume-Uni

BBC : Défini par le code de déontologie

La BBC ne diffuse aucune émission sponsorisée mais peut en revanche parrainer un événement. A l’occasion de grandes rencontres sportives par exemple, les règles du partenariat sont clairement énoncées à l’antenne.

The Guardian : NC

Suisse

La Liberté : Le service marketing est décisionnaire

La rédaction peut avoir un rôle de conseil dans le choix des partenariats mais n’est pas décisionnaire.

Le Temps : Indépendance éditoriale

Le service marketing ou le service commercial peuvent monter un partenariat mais c’est la rédaction qui choisit ou refuse une couverture journalistique.

De façon générale, tous les projets de partenariats importants sont discutés avec la rédaction qui conserve farouchement son indépendance éditoriale.

RTS : Étanchéité

La rédaction et le service marketing fonctionnent de façon étanche. La direction de l’actualité ne participe jamais aux réunions concernant les partenariats. Et la rédaction n’est jamais tenue à une couverture spécifique du sujet.

Des règles internes pour lutter contre la publicité clandestine permettent aux journalistes de ne pas citer les noms des sponsors. Il sera dit par exemple « la patinoire de Suisse à Berne » plutôt que le « PostFinance-Arena ».